Lettre ouverte aux Dirigeants
Une progression à 2 chiffres en 2017 ? Est-ce encore possible ?
Haaaaaa elles sont loin les belles années où les chiffres étaient stables voir en progression chaque année ! Loin aussi le temps où 2 ou 3 points de marge en moins n’étaient pas aussi cruciaux qu’aujourd’hui ! Pourtant, certains d’entre nous progressent… ! Pendant que d’autres se demandent à quelle sauce ils vont être mangés l’année prochaine !? Ce n’est pas moins de 3000 (Moyenne) de nos confrères dirigeants qui mettent la clé sous la porte chaque mois ! (Source Score3.fr)
3000 chômeurs de plus par mois, mais ça ne préoccupe pas grand monde puisqu’ils ne coûteront rien à la collectivité, ils n’ont pas le droit aux allocations chômage ! Nous, ça nous préoccupe sérieusement car nous sommes de ceux là ! Et vous qui lisez ces lignes, vous seul savez combien l’enjeu est de taille…
C’est pourquoi nous avons décidé de jeter un nouveau « Pavé dans la marre » comme on dit !
En effet, comment un chef d’entreprise qui tient sa barque depuis plusieurs années peut se retrouver dans cette situation ? Comment un homme qui a su braver la fiscalité française, le management de son équipe, l’augmentation du coût des matières premières et des services, affronter la confiance toujours fragile de ses clients comme de sa banque, la concurrence pas toujours loyale et les reformes qui peuvent impacter son activité peut devenir un simple demandeur d’emploi « sur le carreau » ??
Grace à l’accompagnement des entreprises et des entrepreneurs depuis maintenant 14 ans, nous avons identifié quelques motifs majeurs. Ces motifs, nous les avons filtrés afin qu’ils n’offrent pas d’excuses aux responsabilités qui sont les nôtres. C’est pourquoi, dans ces motifs identifiés nous ne nous attarderons pas sur les raisons contextuelles, nous resterons centrés sur l’Homme (L’entrepreneur) et son œuvre (L’entreprise).
L’image d’Epinal qui illustre « qu’une équipe qui est à l’image de son « chef » » est également valable pour l’entreprise elle-même ; en effet c’est l’entreprise toute entière qui se montre belle et bien à l’image de son Dirigeant. Cette entreprise a l’audace de son Dirigeant, les ambitions de son Dirigeant, les forces (commerciales, techniques, organisationnelles…) de son Dirigeant. Elle porte en elle aussi les faiblesses de son Dirigeant, son manque de vision, son essoufflement, son sentiment d’acquis, ses imperfections, ses doutes dans ses choix et son hésitation face à l’inconnue. ..
Face à l’irrégularité du business, les Dirigeants ont quelques réactions à la fois typiques et fatales.
- Ils alimentent et entretiennent le déni
- Ils cultivent la politique de la réparation partielle
- Ils passent en mode « Subi » plutôt qu’en mode « Choisi »
- Ils se rigidifient
- Ils croient aux miracles
- Ils se montrent exigeants
- Ils ont honte et ils culpabilisent
- Ils baissent les bras
Ils alimentent et entretiennent le déni
Le premier réflexe quasi programmé chez les Dirigeants qui veulent bien commencer seulement à admettre que la baisse de C.A. est réelle est d’en nier le caractère possiblement durable. « Ça ne durera pas ! », « J’en ai connu d’autres des crises comme ça ! », « On ne change pas une équipe/méthode qui gagne ! », « Pas question de céder à la panique, ça va bien repartir ! »… Ces si nombreuses remarques ont davantage le mérite de tenter de rassurer leurs auteurs que de se montrer pragmatique face au contexte socioéconomique. Non, vous n’avez jamais connu cela, pas avec autant de facteurs aggravants qu’aujourd’hui. Pas dans un vortex convergent de complications duquel une vision floue émerge en permanence sans même vous laisser le temps de reprendre la main.
Dans cette vision du Déni s’ajoute la sous estimation systématique du degré critique de la situation ! La fiabilité du regard du Dirigeant qui regarde ses chiffres décroître lentement ne tient pas compte de la vitesse à laquelle évoluent les marchés. Cette donne désormais nouvelle contraint à repenser totalement notre perception d’une « chute probable » pour la requalifier de « mort certaine » ! Oui, je sais, mes mots sont durs, ils sont durs car ils sont vrais…
Ils cultivent la politique de la réparation partielle
A l’image d’un particulier pas très sûr de vouloir investir dans une nouvelle voiture (Je n’ai pas dit une voiture neuve), celui-ci commence par réinvestir son ancienne auto en lui offrant un nouvel embrayage (1500€) « En espérant qu’elle va tenir » dit-il. Puis, 2 mois plus tard, lorsque c’est la ligne d’échappement qui lâche, il se dit que 1000€ d’échappement c’est toujours moins qu’une nouvelle voiture et surtout, « Je ne vais pas la lâcher maintenant que je viens de mettre 2000€ d’embrayage, je ne suis pas fou ! » (Qu’il croit)… Puis le temps passe et c’est la nouvelle révision (350€) qui arrive avec son lot de surprises à vous empêcher de dormir la nuit… Courroie de distribution à bout de souffle (800€), alternateur fatigué (390€), là-dessus 4 pneus (1000€) + 2 jeux de plaquettes (150€) et 1 paire de disques(800€) et votre budget est parfaitement allégé pour les 2 ans avenir !
Je reprends ? Total 5990€ ! C’est pas mal comme budget de démarrage pour se lancer dans une nouvelle acquisition non ?
Pas si loin que ça de la réalité non ? N’est-ce pas là une triste métaphore qui illustre bien les tentatives de réparation partielle que les Dirigeants opèrent sur leur entreprise afin de ne pas les laisser souffrir de ce petit « bobo » qui gène tout le monde. Cette petite réparation partielle est-elle suffisante ? Réparez-vous vraiment là où c’est nécessaire ou bien là où vous y voyez encore quelque chose ? Le mal n’est-il pas plus grand ? Quels sont les symptômes qui vous permettent de dire que le diagnostic est le bon ? Mieux encore qu’est-ce qui vous permet de dire que vous n’allez pas réparer ailleurs dans quelques mois ? Avez-vous réellement pensé à regarder les indicateurs autrement plus complets que vos habituels « marottes » qui vous trompent aujourd’hui ?
Ils passent en mode « Subi » plutôt qu’en mode « Choisi »
Il y a quelques années, lorsque vous avez créé l’entreprise, il y avait tout à construire. Vous n’aviez pas d’autres choix que d’être visionnaire et miser sur l’avenir avec des incertitudes qui ne vous faisaient pas peur. Vous deviez décider, trancher, investir, payer pour voir, perdre un peu et vous prouver jour après jour que vous aviez finalement raison. Mais qu’en est-il aujourd’hui ? Qu’en est-il lorsque le capital est plus important, lorsqu’il y a réellement quelques-chose à perdre ? Avez-vous conservé votre audace ? Avez-vous entretenu chaque année votre ambition de garder votre place ou bien avez-vous laissé votre succès vous éblouir pour vous laisser lentement conduire à un aveuglement tel que vous êtes passé en mode « Subi » plutôt que ce que vous avez connu des années plutôt : un mode « Choisi ».
Le marché et ses exigences ne vous ont-il spas rattrapés d’abord pour vous doubler ensuite ? Quand allez-vous décider de reprendre les choses en mains ? Lorsque vous en prendrez conscience comme ces 2000 entrepreneurs par an qui traversent une période de redressement judiciaire en transpirant de tous leurs pores, qu’allez-vous faire ? Si vous ressentez cette sensation de subir, c’est qu’il est plus que temps de vous mobiliser… réagissez maintenant !
Ils se rigidifient
Le bambou se courbe sous le vent, le chêne, lui, se rompt.
Les années vous ont conforté dans vos certitudes. Maintes et maintes fois vous avez repoussé les assauts en tous genres : contrôle fiscale, concurrence accrue, arrivée d’internet, hausse des prix… Chaque fois vous avez su trouver la parade, chaque fois vous avez rebondi d’un nouveau souffle, d’une nouvelle hargne qui a fait de vous un de ceux qui ont su rester alors que d’autres avaient déjà péri. Ce n’est pas une nouvelle attaque qui va vous faire peur et vous avez raison ! Mais ce n’est pas une « nouvelle attaque » c’est un ras de marée, un tsunami contre lequel vous n’êtes pas préparé et contre lequel vos « Bonnes vieilles méthodes » vont se montrer obsolètes. Courber l’échine pour entrer davantage dans le froid est courageux mais perdu d’avance lorsque c’est pour entrer non pas dans un hiver rigoureux mais dans un pôle nord qui n’est même pas sur votre carte. Le temps de la remise en cause ne serait-il pas venu ? Dans le cas contraire, demandez-vous quel pourrait en être le prix à payer ?
Ils croient au miracle
Haaaa les miracles, c’est tellement bon d’y croire que même nous, les chefs d’entreprise nous y croyons encore parfois ! Trêve d’arrogance… Comme tout chef d’entreprise qui se respecte vous avez acquis des certitudes. Et chaque fois que vous avez dû faire des choix, vous les avez toujours faits en pensant que c’était le meilleur choix pour ne pas dire le premier et le seul ! Autrement vous en auriez fait un autre ! Aujourd’hui, vous ne pouvez plus vous permettre de croire à ce que vous avez toujours cru, la preuve, autrement, vous ne seriez pas en train de lire ces lignes ! Je me trompe ? Pour la première fois, vous commencez à douter et vous avez bien raison, la remise en cause commence par le doute ! Et si vous empruntez cette voie, ne vous laissez pas cueillir au vol par une idée rassurante mais non réaliste qui vous fera quitter le chemin d’un retour au succès. Conseil majeur, ne restez pas seul, ne pensez plus seul, c’est une impasse autrement vous n’en seriez pas là.
Ils se montrent exigeants
Les années ont passée et vous ont rendu exigeant grâce aux nombreux bénéfices que vous avez pus tirer de votre entreprise. Vous avez connu le temps où vous deviez vous passer d’une fin de mois meilleure sans sourciller, où certains projets ou achats pouvaient être remis à plus tard sans réelle frustration. Depuis, vous avez appris à obtenir ce que vous vouliez et ceci dans une spirale à la fois grandissante et envoutante. Ceci au point d’en oublier vos privilèges en commençant par le premier : votre indépendance
Quoi de plus précieux que cette indépendance à laquelle vous tenez tant mais pour laquelle vous n’êtes, malgré tout, plus capable de solder votre grosse voiture ! Vous avez tellement appris à obtenir que vous n’envisagez pas sérieusement de devoir réapprendre à renoncer. Croyez-vous que cela soit raisonnable ou plus simplement réaliste ? Croyez-vous devoir vous couper un doigt ou un bras ? Au regard de la courbe de chiffre qui vous accable, qu’est-ce qui est le plus sage ?
Ils ont honte et ils culpabilisent
Avez-vous déjà entendu un chef d’entreprise vous dire qu’il avait honte de sa situation ? Vous dire qu’il culpabilisait de ne pas savoir quoi faire et d’en être là ? Moi jamais ! Pourtant, ce serait un sentiment bien naturel lorsque l’on porte autant de responsabilités sans jamais faillir et que, malgré tout, un jour, la lumière peut s’éteindre ! C’est en secret qu’ils souffrent, c’est en secret qu’ils se rongent les sangs. Ils ont appris à être seuls et aujourd’hui, ils sont « tout seuls ». Mais qu’attendent-ils donc pour aller voir ce qu’il se passe ailleurs ?
Ils baissent les bras
Puis, un jour arrive où tout ça est tellement lourd à porter qu’ils baissent les bras, entretenant le rêve secret que tout s’arrête sans trop de dégâts. Ainsi ils pourront repartir à zéro, trouver peut-être un nouveau souffle qui les fera renaître de leur cendre. Une guillotine redoutablement rapide qui leur économisera de long mois de déchéance. Est-il vraiment indispensable de perdre autant avant d’aller à l’encontre du renouveau ? Faut-il que vous soyez fou pour laisser ces quelques années difficiles ruiner le projet d’une vie ? Et s’il pouvait en être autrement ? Et si la « fin » n’était pas plus réelle que « l’acquis » ? Et si après vous être fourvoyé, vous décidiez de redevenir ce que vous n’avez jamais cessé d’être : un entrepreneur
Chers confrères entrepreneurs, cette lettre est pour vous. Où que vous soyez, quoi que vous fassiez, lisez et relisez ces lignes, elles sont pleines de sagesse et de bienveillance. Dans notre monde d’aujourd’hui avez-vous trouvé mieux que l’espoir et la combativité ?
Synthégralement vôtre
S.Deloison